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FÉDÉRATION / SYNDICAT

Jean-Marc Torrollion : « nous devrons travailler avec les différents courants politiques »

Jean-Marc Torrollion DR

Lendemain d'élections législatives... À la complexité du contexte international et de la situation économique vient s'ajouter un peu plus de complexité politique. Pour Jean-Marc Torrollion, le président de la FNAIM, cette nouvelle donne peut être positive pour l'investissement immobilier, mais nécessitera une vigilance accrue de la profession, ainsi qu'une présence renforcée et démultipliée auprès des différents courants représentés dans l'hémicycle. Décryptage.

Au lendemain des élections législatives, Amélie de Montchalin - la ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires - doit quitter le gouvernement peu de temps après y avoir été nommée. Quel est votre sentiment ?

Suite aux élections présidentielles et à la nomination du nouveau Gouvernement, nous avions rencontré Amélie de Montchalin avec Bruno Le Maire concernant l'augmentation des loyers et pour empêcher un gel de l'Indice de référence des loyers (IRL). Nous devions de nouveau rencontrer la ministre pour tous les autres sujets touchant à la profession et à la rénovation énergétique. Force est de constater que les choses seront bientôt à reprendre avec une rencontre déjà programmée avec une ou un nouveau ministre du logement, que nous ne connaissons pas encore. Nous espérons que ce rendez-vous sera tenu, car nous avons de nombreuses urgences à traiter. Au regard d'ailleurs du basculement des représentations politique au sein de l'hémicycle, je pense que les contacts parlementaires seront déterminants. Nous nous mettrons au travail en ce sens. Nous suggèrerons de créer un groupe d'études dédié au Logement à l'Assemblée nationale pour traiter les enjeux.

Qui souhaiteriez-vous voir nommé à sa place ?

Comme toujours, nous sommes attentifs à la compétence des interlocuteurs que nous sommes amenés à avoir. Plus ceux-ci connaissent le logement, plus nous gagnons en temps et en compréhension. L'idéal serait d'avoir un élu local fortement implanté qui, en parallèle, aurait une connaissance des arcanes de la politique du logement et une vision globale des enjeux. Pas uniquement du logement social, ni de la construction neuve, mais aussi de la rénovation énergétique et des enjeux de logement existant. Bref, nous souhaitons avoir une perle rare !

Est-ce l'opportunité de re-revendiquer la création d'un ministère du logement à part entière ?

Oui, c'est totalement nécessaire et je pense aussi que l'écoute des corps intermédiaires - la FNAIM, mais aussi la FPI, la FFB, etc. - comme les maires, est une nécessité. Dans la période extrêmement délicate que nous traversons, ceux-ci devront jouer un rôle d'amortisseurs et de cohérence pour éviter des mesures hors-sol, très politiques, et déconnectées des réalités des Français ou de celle du marché. Nous attendons donc un grand ministère et de la compétence, intégrant toutes les parties prenantes, pour éclairer tous les sujets.
La charge ministérielle actuelle comporte de nombreuses attributions : développement durable, cohésion des territoires, environnement, lutte contre le changement climatique, décentralisation, transports et infrastructures, équipement et BTP et enfin logement et urbanisme. À l'heure des urgences environnementales et de la lutte contre les précarités, n'est-il pourtant pas cohérent de toutes les relier en un seul ministère ?
On pouvait effectivement considérer qu'Amélie de Montchalin, de par son poids politique et au regard de l'ensemble des compétences qu'elle incarnait, pouvait être la bonne personne. À condition, bien sûr, qu'elle ait exercé la totalité de ses différentes attributions. Elle nous avait en plus assurés, lorsque nous l'avions rencontrée, qu'elle incarnait ce rôle de ministre du logement attendu par les professionnels. Tout dépendait donc de la volonté de cette ministre. Si celui ou celle qui sera prochainement nommé reproduit cette ambition et possède un réel poids politique, la formule peut tout à fait fonctionner.

Les résultats des élections législatives - avec l'avancée de la Nupes et la forte progression du RN - sont-ils à même de bousculer la politique du logement ?

C'est encore difficile à anticiper, mais pour moi, la FNAIM a été bien inspirée lors de son dernier congrès d'avoir fait venir tous les courants politiques et notamment les partis écologistes, RN, etc. L'avantage que nous avons donc désormais, c'est que ces courants présents à l'Assemblée nationale connaissent la FNAIM et que de notre côté, nous connaissons pour partie la teneur de leur vision. Sur la rénovation énergétique par exemple, j'ai la sensation d'un pragmatisme avec un souci de l'objectif à atteindre. Nous pouvons avoir des ambitions trans partisanes sur cette question très technique, qui seraient en outre compatibles avec la réalité des Français. À nous de jouer notre rôle, avec la difficulté cette fois-ci de devoir tenir compte de différents courants politiques et de prendre contact avec tous alors que jusqu'ici, nous avions essentiellement travaillé avec une majorité gouvernementale.

Pensez-vous que la politique énergétique amorcée lors du précédent quinquennat va se poursuivre dans la même lignée, voire même qu'elle pourrait s'accélérer ?

La politique énergétique dépend en grande partie d'événements extérieurs que nous ne maîtrisons pas. Jusqu'à aujourd'hui, l'énergie était relativement peu chère et le retour sur investissement faible, freinant de ce fait les travaux de rénovation énergétique. Désormais la donne va changer. Le bouclier tarifaire a coûté plus de 26 milliards d'euros aux finances publiques, il sera reconduit sans doute avec le projet de loi sur le pouvoir d'achat. Le double signal d'une énergie chère et du réchauffement climatique devrait donc infléchir toutes les volontés dans le bon sens. En revanche, la FNAIM déplore le choix de la Loi Climat et résilience d'avoir créé un calendrier de rénovation énergétique pour le seul parc locatif, en prévoyant aussi un calendrier pour la rénovation des logements E, sans aucune ambition en réalité pour éradiquer l'ensemble des passoires énergétiques. C'est une erreur magistrale, car cela ne répond pas à l'exigence de neutralité carbone de 2050 et ne correspond pas aux impératifs européens. Nous suggérons de nous aligner sur ce calendrier européen, en nous concentrant sur les logements très énergivores, mais en prévoyant des obligations à tous ces logements, y compris ceux occupés par leurs propriétaires, pour qu'ils atteignent le niveau E sur 10 ans.

Et en matière de fiscalité, les lignes pourraient-elles bouger ?

Ce sera un sujet difficile. Dans le contexte actuel, je ne sais pas quelles avancées nous pourrions obtenir, sauf à obtenir une vision partagée entre la REM et les Républicains sur ce point. Ce n'est d'ailleurs pas impossible.

Selon vous, quelles sont ou seront, les sujets prioritaires à traiter pour le nouveau gouvernement ?

La rénovation énergétique et le pouvoir d'achat restent les sujets centraux. Le Gouvernement pourrait avoir une action en déverrouillant l'obstacle du taux d'usure. Il pourrait en effet intégrer plus rapidement l'effet de hausse et la volatilité des taux, revoir le mode de calcul, afin de ne pas bloquer les financements. Enfin, la prolongation du prêt à taux zéro retrouvera tout son intérêt dans le contexte que nous traversons.

Photo | Jean-Marc Torrollion DR

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