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POINT DE VUE

Proposition de loi Nogal : l'investissement locatif immobilier transfiguré

Le moins qu'on puisse dire est qu'en 2019 les relations entre les professionnels immobiliers et les pouvoirs publics auront été complexes, tantôt heureuses, tantôt délicates.

Au rang des moments idylliques, l'obtention du titre protégé d'agent immobilier et d'administrateur de biens, peut-être suivie en 2020 de la reconnaissance officielle de l'emblème associé conçu par la FNAIM, le caducée figurant la déesse Vesta. On se doit de noter aussi des évolutions heureuses dans la loi ELAN et dans l'ordonnance prise en application de ce texte au profit des copropriétés. Moins heureux aura été le plafonnement des honoraires de vente de logements acquis en défiscalisation, intervenu juste après Noël, mettant fin à deux années d'attente depuis la promulgation de la loi de finances qui en avait posé le principe.

Et puis il y eût le rapport rendu à l'abord de l'été par le député Mickaël Nogal, missionné à la fin de l'année précédente par le Premier ministre et le ministre de la ville et du logement, pour « louer en confiance ». Là, les Athéniens s'atteignirent : généraliser la garantie contre les impayés de loyer et les dégradations locatives, contraindre les gestionnaires à séquestrer les dépôts de garantie des locataires et ne pas les restituer à leur client propriétaire, et enfin contraindre les particuliers qui gèrent eux-mêmes leur logement locatif à confier le dépôt de garantie de leurs locataires à un administrateur de biens - ce qui implique que ces professionnels acceptent une nouvelle fonction, détachée de celle de gestionnaire et de loueur, voilà le contenu de la proposition de loi que le député déposera dans les premières semaines de l'année 2020, à l'issue d'une année de consultations et de réflexion.

La communauté professionnelle a accueilli fraichement ces évolutions. Certes, elles vont modifier profondément les pratiques et elles engagent les administrateurs de biens au-delà des moyens, et les obligent au résultat. Les craintes sur les conditions de la réassurance pour parvenir à sécuriser le versement des loyers au propriétaire à bonne date sont audibles et compréhensibles. Il reste que l'essentiel n'est pas là et les débats ne l'ont pas mis en évidence, à force de se centrer sur les acteurs, intermédiaires, locataires et propriétaires: au passage, l'investissement locatif privé devient un placement à rendement garanti, à l'égal de quelques autres de nature financière, obligations ou épargne administrée, et devant tant d'autres qui n'offrent pas cet atout, les actions ou encore le crowdfunding. C'est un changement de paradigme.

A la clé, un succès majoré de ce support, que les ménages prisaient déjà de plus en plus, lucides sur les besoins en logements locatifs, en particulier dans nos grandes villes inatteignables à beaucoup de candidats à la propriété. Contre tous les Cassandre qui annoncent une vague de désinvestissement pour toutes les raisons du monde, de l'encadrement des loyers à l'impôt sur la fortune immobilière en passant par le déséquilibre légal des relations entre propriétaires et locataires, la part des achats dans l'ancien pour louer a plus que doublé en cinq ans, concentré dans les métropoles.

Or, ceux qui ne se sont pas associés au mouvement arguent tous de l'aléa de l'impayé, déjà éprouvé ou simplement craint. La future loi Nogal, avec pour auxiliaires du législateur les administrateurs de biens, appelés à sécuriser les investissements qu'ils gèrent et même à faire croître le degré de sécurité de ceux qu'ils ne gèrent pas, dote l'immobilier de rapport de la seule vertu qui lui manquait vraiment: la régularité des revenus fonciers.

En clair, le bénéfice est macro-économique, tout en améliorant la situation micro-économique des acteurs, tous gagnants dans l'histoire: les bailleurs bien sûr, les locataires aussi parce que les barrières à l'entrée de la location vont s'abaisser et les professionnels, installés dans le rôle de tiers de confiance auquel ils aspirent tant.

Certes, d'autres progrès devront être accomplis, suggérés par le même rapport Nogal -notamment pour une meilleure efficacité de l'appareil judiciaire en cas de différend entre les parties à la location- ou encore par le rapport du député Jean-Luc Lagleize. Bien que relatif au foncier, il explore des pistes fiscales pour donner plus d'attrait à l'investissement locatif résidentiel. En tout cas, l'avenir du locatif privé, qui était jusqu'alors davantage un sujet de débat et de congrès, est entré de plain pied dans le chant de l'action politique. C'est peut-être l'apport le plus considérable du travail du député Nogal, soutenu par Julien Denormandie.

Henry Buzy-Cazaux, président de l'Institut du Management des Services Immobiliers, président du think tank « République et logement » - 06 16 02 68 45

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