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ALERTE

Délai du commandement, un mois sinon rien ?

De quoi parle-t-on ?

La clause résolutoire de plein droit du bail commercial est encadrée par l'article L 145-41 alinéa 11 du code de commerce. Cet article prévoit non seulement que la résiliation de plein droit ne joue qu'un mois après qu'il a été fait, sans succès, commandement à la partie défaillante de remplir ses obligations mais encore que le délai d'un mois doit être mentionné dans le commandement sous peine de nullité.

La question

MENTIONNER LE DÉLAI LÉGAL D'UN MOIS DANS LE COMMANDEMENT VISANT LA CLAUSE RÉSOLUTOIRE SUFFIT-IL À PALLIER L'IRRÉGULARITÉ D'UNE CLAUSE RÉSOLUTOIRE QUI PRÉVOIRAIT UN DÉLAI INFÉRIEUR À UN MOIS ?

La réponse

La clause résolutoire de plein droit stipulé dans un bail commercial est une clause aux termes de laquelle les parties prévoient, à l'avance, que l'inexécution par l'une d'entre elles de ses obligations prévues au contrat aura pour effet de permettre à l'autre d'obtenir la résiliation dudit contrat. Lorsque les conditions prévues par la clause résolutoire sont réunies et que le formalisme de l'article L 145-41 est respecté, la résiliation est « de plein de droit », soit quasi-automatique. Le juge ne peut, normalement, que constater l'acquisition de la clause résolutoire c'est à dire la résiliation du contrat. La Cour de cassation2 a toutefois eu récemment à s'interroger sur la validité d'une clause résolutoire mentionnant un délai inférieur à celui prévu à l'article L 145-41 précité et d'un commandement pris sur le fondement de cette clause. L'affaire concernait la clause résolutoire d'un bail commercial prévoyant qu'elle pourrait jouer quinze jours après un commandement non suivi d'effet. Le bailleur a fait délivrer un commandement visant la clause résolutoire du bail puis a assigné le preneur afin qu'un juge constate l'acquisition de la clause. Toutefois, conscient du caractère irrégulier de la clause résolutoire du bail (prévoyant un délai inférieur à celui fixé par l'article 145-41 alinéa 1 précité), le bailleur avait mentionné dans son commandement le délai légal, soit un mois. La cour d'appel de Rennes a considéré, conformément à l'article L 145-153 du code de commerce qui prévoit que sont nuls et de nul effet les clauses ayant pour conséquence de faire échec aux dispositions de l'article L 145-41 précité, que la clause résolutoire était nulle en ce qu'elle mentionnait un délai de quinze jours et non le délai légal. Par voie de conséquence, elle a jugé le commandement dépourvu d'effet car pris sur le fondement d'une clause nulle et ce, quand bien même il mentionnait le délai légal d'un mois. La Cour de cassation a confirmé cette décision. Ainsi, une clause résolutoire insérée dans un bail commercial mentionnant un délai contraire aux dispositions de l'article L 145-41 du code de commerce est nulle, en application de l'article L 145-15 du même code, et les actes pris en vertu de cette clause sont donc sans effet.

1)«Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit d'effet qu'un mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement de payer doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.» 2) Cass. 3e Civ., 8 décembre 2010, n° 09-16.039

La Cour de cassation confirme dans cet arrêt du 8 décembre 2010 la rigueur avec laquelle elle interprète la mise en oeuvre des clauses résolutoires de plein droit prévues dans les baux commerciaux. Cette jurisprudence semble dans la droite ligne de celle plus générale concernant les exigences de forme du commandement lui-même. Ainsi, la Cour de cassation avait annulé un commandement comportant une formulation trop générale3 et la cour d'appel de Papeete4 un commandement mentionnant le délai d'un mois mais dont le libellé avait été considéré comme ambigu. De même, la Cour de cassation5; avait sanctionné un commandement dont notamment le libellé avait été considéré comme pouvant être source de confusion empêchant le preneur d'appréhender le sens exact et la portée du commandement qui lui avait été délivré. Cependant, cette décision, consistant à prononcer la nullité de l'intégralité de la clause résolutoire au motif qu'elle prévoirait un délai inférieur à un mois, semble particulièrement sévère. En effet, la lecture de l'article L 145-41 du code de commerce prévoit que le délai d'un mois doit être mentionné sous peine de nullité du commandement et non de celle de la clause. Cette seule mention ne suffit-elle pas à garantir les droits de la partie défaillante et à être en accord avec l'article L 145-15 précité ? Le bailleur, qui dans l'affaire précitée s'était cru avisé de mentionner dans son commandement non pas le délai contractuellement prévu (soit quinze jours) mais le délai légal (soit un mois), n'avait-il pas ainsi suffisamment préservé les intérêts de son preneur ? Manifestement, la Cour de cassation ne l'a pas entendu de la sorte. Prévoir dans un bail commercial un délai inférieur à un mois pour l'acquisition de la clause résolutoire revient donc à priver purement et simplement le contrat de sa clause résolutoire. Les parties n'auront alors d'autre alternative que de saisir le juge afin qu'il apprécie lui-même la gravité des manquements et prononce, s'il l'estime justifiée, la résiliation judiciaire du bail.

3) Cass. 3e Civ., 28 octobre 2003, n° 02-16.115 4) CA Papeete, 25 janvier 2007: 205/CIV/04 5) Cass. 3e Civ., 3 octobre 2007, n° 06-16.361

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#Bail commercial

#Résiliation

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